Un scénario catastrophe pour l’UMP à l’issue de 2007 ?
Ce
scénario relève de l’impossible, mais un post-soixante-huitard n’a-t-il
pas pour devise : soyons réalistes, réalisons l’impossible ?
Alors
que Sarkozy costarisé pavoisait, dans une Renault peuple français, avec
une Chirac attitude un soir d’avril 2007, face aux motos-caméras
duquesnisées, vendant son costume de ministre avant d’avoir eu la peau
de l’ourse Royal, les dieux du ciel ont vu se dessiner un scénario
imprévisible, signant une défaite cuisante et historique de l’UMP. En
deux temps, d’abord pour les présidentielles puis les législatives. Le
maître d’œuvre de cette opération fait l’objet de toutes les
convoitises. Son nom est François Bayrou.
Essayons
de raisonner. L’UDF, celle du centre droit, pour ne pas dire la droite
orléaniste, incarnée par Giscard, Barre, Robien et Simone Weil, a fait
son temps. 2007 était sans doute sa date de péremption. A force de trop
fréquenter l’UMP et de naviguer entre amitiés et antagonistes, vendant
son âme à un parti puissant se droitisant peu à peu, s’éloignant des
principes sociaux et humanistes du gaullisme, l’UDF était promise à une
phagocytose, autrement dit une disparition. Il était clair que Bayrou
présent ou pas comme candidat au premier tour, le sort était joué. Deux
possibilités, mourir ou se métamorphoser. Au vu des 18,5 points au
premier tour, Bayrou peut envisager une métamorphose et la création
d’un parti centriste. Dans les contextes de crise, ce genre d’opération
n’est pas forcément voué à l’échec. Ariel Sharon a bien réussi avec
Kadima son réajustement politique.
Ca
va karchériser dur dans les lignes de l’UDF ; qui en sera, qui n’en
sera pas parmi les députés du groupe présents dans l’actuelle
Assemblée ? Mais tout pourrait s’éclaircir pour les bayrouistes, avec
également des nouvelles têtes se reconnaissant dans ce centre, si
Bayrou décide, et il doit le faire rapidement, la stratégie qu’il
compte jouer pour les législatives. Du point de vue tactique, un énorme
coup à jouer avec le PS. N’oublions pas que les socialistes sont une
formation qui vieillit, pas très bien, qui faiblit mais en restant
solide cependant comme l’a montré le score de Ségolène Royal. Pour les
législatives, le PS ne pourra pas se passer d’alliance. Une Assemblée
comme en 1981 est impossible. La passe Mitterrand est achevée depuis
longtemps. Le parti démocrate centriste a besoin lui aussi d’un appui.
La seule issue possible, et non seulement possible mais gagnante, ce
serait un accord pour négocier des alliances aux législatives.
Quelle
alliance ? Bien évidemment des accords de désistement du mieux placé
des deux au premier tour pour l’emporter. Puis des accords au niveau
des candidatures. Le PS pourrait décider de laisser à l’UDF des
circonscriptions qu’il sait perdues et inversement. Cela pourrait se
faire sur 100 à 150 circonscriptions. Au bout du compte, cela pourrait
donner 120 à 150 députés pour l’UDF et 220 à 250 députés pour le PS.
Dans la meilleure des hypothèses, l’UMP n’aurait plus que 170 députés.
De
cette belle majorité, on pourrait penser que Bayrou pourrait devenir un
Premier ministre avec un gouvernement d’union qui laisserait une bonne
part pour le PS. Le scénario est pour le moins angélique. On prendrait
les meilleurs à gauche et au centre, avec qui sait quelques têtes
nouvelles issues du ralliement au parti centriste. Bref, Bayrou aurait
réussi son coup, enfin pas comme c’était annoncé puisque l’UMP est mis
de côté, mais bon, notre Béarnais frondeur ne pouvait quand même pas
croire que les droitiers de l’UMP puissent gouverner avec les gens du
PS !
Mais
j’ai juste oublié un détail ! Qui présiderait le conseil des
ministres ? Eh bien peut-être Madame Royal qui, au soir du 6 mai 2007,
pourrait être élue si l’affaire est présentée clairement aux Français
et que le peuple le veut. Dans le cas contraire, il faudra du flair et
les Français devront prendre leur destin en main sur la base des
quelques indications dont ils disposent.
Si
ce scénario se joue, alors la recomposition aura été fulgurante. Les
hommes politiques du centre et du PS sont-ils prêts à une telle
accélération ? Pour qui connaît les secrets du mur du temps rien n’est
impossible. D’ailleurs les intéressés ne vont plus voir le temps
pendant la durée des opérations. La France pourrait se retrouver avec
deux grands ensembles.
D’une
part une droite carrément à droite. Le sort du FN se jouera aussi aux
législatives. En cas de score médiocre, Le FN risque de se disloquer et
Sarkozy pourrait très bien accueillir, dans sa stratégie de reconquête,
une Marine Le Pen par exemple, ou quelques autres figures et, qui sait,
ce Pelletier qui a fait bonne figure en directeur de campagne de De
Villiers. Un jeune fort sympathique du reste.
D’autre
part, une alliance centre et PS. Quant aux formations à gauche de la
gauche, elles pourraient subir un sort similaire, surtout le PC dont
les meilleurs et moins bloqués pourraient rejoindre le PS. Les Verts
sont morts, le PS pourrait prendre Voynet et quelques-uns avec lui. A
titre provisoire, le PC et les Verts pourraient conserver quelques
députés à l’Assemblée.
Les
historiens du futur pourraient méditer le bouleversement de 2007, y
voir une tendance à la bipolarisation, un chemin vers une opposition
entre une droite à la Bush incarnée par Sarkozy et un grand parti
démocrate avec une aile centriste et une aile socialiste. Après tout,
être démocrate et libéral c’est être progressiste aux Etats-Unis et,
chez nous, la gauche est censée être elle aussi progressiste alors
pourquoi pas en alliance avec le nouveau parti démocrate de Bayrou ? La
question porte aussi sur la nature des hommes politiques. Veulent-ils
servir l’intérêt de leur pays ou bien conserver leur acquis et se
comporter en petits calculateurs ?
Dans
un coin de l’échiquier, un homme politique s’ennuyant de sa retraite
médite quelques formules. Les médias les appellent les raffarinades.
Bayrou needs Royal to win against Bayrou.
Royal needs Bayrou to win against Sarko.